Black Gives Way To Blue

Laurent Blanc n’a pas démissionné, Laurent Blanc s’est excusé. Voilà le principal dénouement de l’affaire des quotas qui a agité la Fédération Française de Football ces dernières semaines. Pour le reste, on attendra…

Laurent Blanc n’a pas démissionné, Laurent Blanc s’est excusé. Voilà le principal dénouement de l’affaire des quotas qui a agité la Fédération Française de Football ces dernières semaines. Pour le reste, on attendra…

La France est un pays malade. Sans tomber dans une déclinoïte aigüe, force est de constater qu’elle souffre depuis vingt-cinq bonnes années d’un malaise identitaire qui entretient un climat nauséabond. Elle considère l’immigration comme un « problème » et essaie tant bien que mal de se rattacher à des « valeurs françaises » dont on se demande bien ce qu’elles sont réellement. En 2002, elle envoyait un candidat d’extrême-droite au second tour d’une élection présidentielle. En 2007, elle approuvait, par l’élection de Nicolas Sarkozy, la création d’un ministère de l’Identité nationale. Et en 2011, la nouvelle présidente du Front National est créditée par les instituts de sondage d’environ 20% d’intentions de vote. Voilà où on en est. Voilà où en est ce pays.

Dans ce contexte malsain et dérangeant, il apparaissait miraculeux que le football puisse échapper à ces relents identitaires, racistes et xénophobes. La tragi-comédie de la dernière coupe du monde en Afrique du Sud a été l’élément déclencheur. Quand la ministre des Sports Roselyne Bachelot évoque l’été dernier à l’Assemblée Nationale « une équipe de France où des caïds immatures commandent des gamins apeurés » tout est dit. Transformer une défaite d’une équipe sportive à une compétition internationale en affaire d’état est déjà sombrement ridicule. Mais tenter d’expliquer des mauvais résultats en mêlant pêle-mêle la religion, la crise des banlieues ou raccourcis populistes du même acabit est moralement à vomir. L’affaire des quotas est en ce sens dans l’extrême-droite ligne de Knysna. Le sur-emballement médiatique autour de cette question confère au grand n’importe quoi. A ce titre, il eut été de bon goût pour Mediapart d’éviter ce teasing permanent dans la révélation d’informations, fussent-elles toutes authentiquement vérifiées. Mais, surtout, concernant le fond de l’affaire, il faut tout de même faire preuve d’une stupidité inouïe pour évoquer des quotas dans le football. La conception du raisonnement est vertigineuse : l’Espagne est championne du monde, ils ont des petits joueurs blancs, il faut donc à l’équipe de France des petits joueurs blancs. Ce syllogisme d’une crétinerie abyssale est prodigieux. Quant au soi-disant problème des bi-nationaux, il prête au mieux à sourire. Un pays qui compte 66 millions d’habitants et plus de 2 millions de licenciés qui geint parce que deux ou trois joueurs ont choisi une autre sélection nationale que la glorieuse équipe de France…

C’est finalement, comme souvent, la peur qui a été le terreau de ces dérapages incontrôlés. La peur de perdre et la peur de voir partir des joueurs évoluer sous d’autres drapeaux. Pendant ce temps-là, en Europe, on souhaite de plus en plus fermer les frontières pour éviter d’accueillir des réfugiés tunisiens par exemple. Le football n’a pas une existence parallèle à côté de la société. Il en est le résultat. Mais on se plaît à lui fourguer n’importe quel maux car cela évite de se pencher sur nos absences et manquements en tant que citoyens.

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