#Interview Nathan Monti, le gardien du temple
Nous avons rencontré cette semaine Nathan Monti, qui a bouclé cette année sa 15ème saison au Grenoble Foot 38 (!). Une ancienneté – on rappelle que le gardien a tout juste 25 ans – qui en fait un témoin (et acteur) privilégié. On a parlé de son parcours, de son avenir, de ses souvenirs et forcément, de montées – le pluriel lui tient spécialement à cœur. Entretien avec le plus Grenoblois des joueurs du GF38.
Nathan, peux-tu déjà nous donner quelques nouvelles (il a été opéré du coude il y a quelques semaines) ?
Ca va doucement. J’ai toujours une attelle pour encore deux semaines. J’ai deux cicatrices et des agrafes sur le coude mais la douleur est supportable. J’ai hâte d’aller entamer ma rééducation à Cap Breton dans deux semaines.
Comment t’es-tu blessé ?
A force de plonger ! J’ai développé une arthrose, je ne pouvais plus étirer le bras, je n’avais plus vraiment de force. On a profité des vacances qui approchaient pour décider que c’était le bon moment pour me faire opérer.
Un choix sûrement difficile alors que la fin de saison s’annonçait passionnante à jouer…
Je ne supporte pas d’être à 100% et je ne pense pas que j’aurais pu beaucoup aider l’équipe. Papa Demba (Camara) était en plus là pour assurer derrière.
Comment as-tu vécu la montée en National, toi qui étais déjà un des rares présents lors de la l’accession de CFA2 à CFA ?
Les deux montées sont différentes, j’ai trouvé celle de cette année beaucoup plus forte. En CFA2, nous avions surfé sur la première place tout au long de la saison. Là ça faisait 5 ans qu’on attendait ce moment là. Ce n’est pas comparable. Cela fait du bien au club. C’est fabuleux ce qu’a fait l’équipe sur cette 2ème partie de saison.
Comment expliques-tu que cette année ait été la bonne ?
Déjà avec le petit supplément de réussite par rapport aux années précédentes. Je pense au match à Lyon par exemple, où l’on marque deux fois dans les dernières secondes.
Ensuite je pense qu’il y a deux éléments très forts. Le premier c’est l’état d’esprit. Cela peut sembler un peu bateau de dire ça mais on était une vraie bande de copains. C’est rare de trouver des gars comme ça. Je te parle pour l’équipe Une mais c’est valable pour tout le club. Les relations entre nous ont vraiment été spéciales cette saison.
Le deuxième élément c’est la concurrence. Il y avait un groupe d’une grosse vingtaine de joueurs et le coach pouvait changer un élément par un autre sans perte de qualité. Ca a poussé tout le monde a donné le meilleur tout au long de l’année. Ca a aussi eu un effet avec la réserve.
Les descentes de CFA ont pour toi été un élément déterminant dans la saison de l’équipe 2 ?
Quand tu as 6-7 joueurs qui descendent chaque week-end, et qui surtout jouent le jeu, ça change tout. Des mecs de la qualité de Mathieu Lafon, Nicolas Belvito, Hugo Cianci sur la fin de saison… En DHR ils sont très au-dessus, ils apportent beaucoup et permettent au niveau global de l’équipe de s’élever.
Le rôle de Frédéric Gueguen a été déterminant de ce point de vue là…
Coach adjoint de l’équipe 1 et coach de l’équipe réserve : pour moi ce système est le bon. Fred a parfaitement su faire la transition. Dès le début de saison son discours en réserve était « soyez bon là si vous voulez jouer en CFA ». Au final on fait beaucoup de matchs nuls, mais on ne perd qu’une fois, et encore une défaite évitable.
Passons à ton parcours, tu viens de finir ta 15ème année au club. Quels souvenirs marquants te viennent à l’esprit sur tes premières saisons au GF38 ?
Je suis arrivé en Benjamins. Les premiers gros souvenirs sont liés à l’intégration au centre de formation. J’ai 14 ans, je joue contre des équipes « L1 » en championnat (Marseille, Monaco…). A cet âge là ça fait bizarre de dire à ses parents « Je pars à Bastia ce week-end ». Cela devient tout de suite une autre dimension et c’est là que j’ai vraiment su que le football allait vite prendre une très grande place dans ma vie.
Est-ce que le risque pour un jeune de 14 ans n’est pas de très, trop, vite s’enflammer dans ces moments là ?
On sait déjà tous qu’on ne finira pas tous pro, on voit comment ça se passe au-dessus et puis chaque année qui passait il y avait de moins en moins de copains des débuts et un gros lessivage. En 19 ans, je crois que nous n’étions plus que 2-3 de l’équipe 14 ans. Pour ma part j’avais aussi un cadre familial où on me disait clairement les choses : l’école était importante, il fallait assurer les arrières dans tous les cas de figure.
Passons à cette fameuse année en U19. On évoque souvent les bons souvenirs (la Gambardella, le parcours en play-offs), quels sont a contrario tes éventuels regrets sur cette période ?
Le regret c’est de perdre la finale des play-offs contre Paris et de ne pas la jouer. Globalement, avec le recul, c’était aussi une période compliquée pour les gardiens (lui et Gary Perrin, ndlr) : il n’y avait pas de hiérarchie définie, on se partageait les matchs et je pense que c’est à ce moment là qu’un gardien a besoin d’enchainer pour progresser. Cela a sûrement freiné notre progression à ce moment là. Maintenant cela reste une super année, de très bons souvenirs pour l’essentiel.
Question plus traditionnelle : le meilleur joueur que tu as pu côtoyer ou affronter pendant cette période ?
Il y en a eu beaucoup ! On affrontait les meilleures équipes de France et le club comptait aussi à cette époque là beaucoup d’excellents joueurs. C’était la période dorée pour les U17, les U19, la réserve.
Si je devais en choisir un je dirais Flo Thauvin. Pour ses qualités techniques déjà mais aussi pour son mental. J’ai une anecdote à ce sujet. Je me souviens d’un moment où on est assis côte à côte, il revient d’une blessure au dos qui l’a éloigné de nombreux mois des terrains et il me dit « dans 6 mois je jouerai avec l’équipe fanion ». Six mois plus tard, il faisait ses premiers pas en Ligue 2. Il était déterminé. A ce niveau là je l’ai toujours trouvé très au-dessus.
Viens le dépôt de bilan. Timothée Dieng nous racontait que c’était une période floue pour lui, tu l’as vécue de la même façon ?
Oui j’ai pas mal réfléchi, c’était le flou dans ma tête. Il me restait une année au centre de formation, j’aurais pu rebondir ailleurs. Le staff m’a dit qu’il comptait sur moi pour être dans les trois gardiens en CFA2 donc j’ai décidé de rester. C’était le meilleur choix je pense, que ce soit au niveau scolaire ou pour conserver un certain cadre familiale.
Arrive le déplacement à Corte, premier match de la saison, et un certain Nathan Monti fait son entrée en jeu… en tant que milieu de terrain. Tu peux nous raconter ça ?
Je l’apprends juste quelques jours avant le match, en milieu de semaine. Je l’ai un peu pris à la rigolade, je me souviens d’une séance de reprise de volée à l’entraînement où ça se passe super bien (rires). On savait que le début de saison allait être galère donc il fallait tous mettre du sien. Même sur le déplacement on est parti le jour même à Marignane où on a pris le bateau. On gagne 2-0 avec des buts de Zoubir et Lebbihi. Moi je rentre en tant que milieu axial mais c’était vraiment trop compliqué de jouer dos au but, complètement pas naturel pour moi qui ai joué toute ma vie face au jeu. Du coup quelques minutes après ma rentrée j’ai demandé à Zoubir, je crois, de permuter pour pouvoir jouer côté gauche. Le reste de mon match a été ultra simple : dès que je recevais le ballon, je le donnais à Manu (Perez, rires).
C’est vrai que cette aventure a vraiment cimenté le groupe. On est resté en Corse la nuit suivante, on a pu se baigner tous ensemble. Cela a créé des liens, au-delà des relations habituelles dans une équipe. Ca a aussi lancé une bonne dynamique pour la saison.
De quand date ta « découverte » du Stade des Alpes ?
C’est en coupe, contre Grand Croix Lorette. Un bon souvenir, il y avait déjà énormément de monde alors que ce n’était pas du tout une affiche. Moi qui allais au stade en Ligue 1 et Ligue cela m’a fait bizarre la première fois. Après j’ai enchaîné en championnat.
Le public se souvient du match contre Saint-Priest où tu détournes un pénalty de ton pote Ange Mavitidi…
En fait ça fait poteau mais c’était un tournant important. On ne menait que 2-1 à ce moment et cela nous a permis d’enchainer.
La presse locale te considère comme un grand spécialiste des tirs au but. Tu revendiques ce costume?!
(Rires) C’est vrai que j’ai eu une période où j’en arrêtais pas mal, j’avais plutôt du flair. Mais je ne me considère pas pour autant comme un spécialiste. Cette année j’ai pris un but sur le seul pénalty qu’on a concédé par exemple.
La 1ère année de CFA tu es également titulaire lors du match à Strasbourg. Quel souvenir en gardes-tu ?
C’est le plus gros souvenir de public que je garde avec celui de Grenoble. On avait joué devant 10 000 personnes. C’était tout de suite après la trêve hivernale, on perd 2-0 mais on comptait beaucoup d’absents lors de ce match (dont tous les exclus du match face à Villefranche ; il n’y avait d’ailleurs qu’un seul défenseur de métier dans le groupe). Mais c’est également beaucoup de plaisir, on joue pour connaître ce genre de matchs.
Si tu as pas mal joué les deux premières saisons, ce fut moins le cas ensuite, comment l’as-tu vécu ?
C’est vrai que les deux premières années j’ai pu jouer une quinzaine de matchs. On y prend goût. Après quand il y a Brice (Maubleu) et Paul (Cattier) devant, deux gardiens qui ont connu le haut niveau, la hiérarchie est claire. Heureusement c’est la période où l’équipe réserve a commencé à « exister », je pouvais jouer des matchs à enjeu chaque week-end, cela restait motivant pour moi.
De petit jeune en équipe Une, tu es petit à petit devenu un « cadre » de la réserve…
C’est vrai, j’ai même souvent eu le brassard. C’est un rôle que j’aime bien. J’apprécie d’aller parler avec les petits jeunes, j’ai été à leur place il y a peu, c’est important de transmettre ma petite expérience et j’aime être ce relais. On a la chance d’être dans un club où l’équipe réserve existe, j’insiste sur ce point mais c’est important et c’est très important pour l’ensemble du club que l’équipe réserve puisse monter en Honneur, avant de viser mieux.
Où en es-tu justement avec le club ?
C’est la phase de discussion avec Max (Marty). J’espère rester. Ca fait 5 ans qu’on attend cette montée j’ai envie de faire partie de ce groupe National. Le défi avec la réserve s’annonce intéressant et puis je reste un compétiteur, on sait que tout va très vite en football. Je veux poursuivre ma progression, je sens que j’ai déjà pas mal évolué dans ma manière de jouer et je veux poursuivre dans cette voie.
On sait que tes études sont importantes également, où en es-tu à ce niveau là ?
Je suis à l’école de commerce de Grenoble, filière Sport et Management. Il me reste encore une année à effectuer avant de valider mon diplôme. Actuellement je suis en stage à Cetup – un des gros partenaires du club, j’en profite pour les remercier puisque mon temps est adapté à ma pratique du football.
Un mot de la fin ?
Un grand merci au club, aux supporters qui n’ont jamais lâché. Et à dimanche pour venir soutenir l’équipe réserve qui joue sa montée !