James Hart (FCG) : « Rester moi-même, c’est le plus important »
Le FC Grenoble reçoit la lanterne rouge Biarritz ce samedi à Lesdiguières quelques jours après avoir fait tomber le leader Clermont. Une rencontre que l’on aborde en compagnie de James Hart qui nous parle également un peu de sa vie grenobloise, de sa santé, de la victoire face à Clermont et de l’Irlande.
[James finissait de faire ses courses quand on l’a contacté d’où l’enchaînement sur cette 1ère question] Est-ce qu’avec le succès du FCG les gens commencent à te reconnaître et t’arrêtent pour te demander un autographe ou te prendre en photo par exemple ?
« Pas du tout (rires) ! Cela n’a dû arriver qu’une seule fois. Mais je ne suis pas quelqu’un qui sort beaucoup, j’habite même juste à côté de l’endroit où je fais mes courses. Même si énormément de personnes suivent les résultats et viennent nous voir jouer, je ne crois pas non plus que Grenoble soit le genre de ville où les gens vont sans arrêt te solliciter. J’ai des joueurs de ma génération qui jouent à Toulouse et là-bas ils ne peuvent pas faire 10 mètres sans qu’on les arrête. Ici on n’est pas dans le même registre de passion. Et cela me va très bien, je suis quelqu’un de plutôt discret. »
Pour rester dans le personnel, comment va ta santé après les petits tracas de ces dernières semaines ?
On m’a posé une fausse dent en attendant que j’ai un retour de l’assurance et que je sache ce que cela va coûter. Pour la gastro, je ne m’attendais pas à être aussi malade que ça et aussi longtemps. Je n’ai pu manger mon premier repas solide que jeudi soir dernier (Grenoble a reçu Clermont le lendemain, ndlr). Et là je n’ai toujours pas retrouvé mon appétit, j’ai l’impression d’avoir très vite mon estomac plein dès que je mange quelque chose. Mais cela va tout de même mieux.
Tu n’as pourtant pas semblé spécialement amoindri lors des minutes passées sur le terrain face à l’ASM…
Si j’avais dû commencer le match, je serais arrivé complètement cuit à la mi-temps. 30 minutes c’était vraiment le maximum de ce que je pouvais faire, et cela a été très dur.
Cela a été dur pour toute l’équipe. A tel point que le staff vous a offert un jour de récupération lundi. Les organismes étaient-ils tant marqués que cela ?
Je pense qu’il suffit de revoir les 5 dernières minutes de match pour comprendre que notre fatigue après un tel match était légitime. Clermont est vraiment impressionnant. Cela joue simple mais efficace, avec des joueurs qui savent ce qu’ils ont exactement à faire et qui le font bien ! Ils ont tous des gabarits impressionnants et comme on a eu l’impression d’avoir à défendre non stop toute la partie face à eux, sans avoir beaucoup de ballons à jouer… Cette équipe n’est pas là par hasard, c’est vraiment ce qu’on a joué de plus costaud cette saison.
Et pourtant vous les avez battu, même si certaines voix se sont élevées pour critiquer ce succès…
Certains ont en effet eu l’impression que notre victoire n’était pas méritée. Peut-être qu’à leur place, nous aurions pensé de même, je ne sais pas. Je crois aussi qu’on a réussi à se mettre en position de pouvoir gagner ce match en ne lâchant jamais rien, en restant à portée de Clermont pendant tout le match jusqu’à ce qu’on mette cet essai. Après il y a certainement des décisions arbitrales qui peuvent être discutées mais c’est comme ça pour tous les matchs et c’est très loin d’être toujours en notre faveur.
Certains jugements sur ce match t’énervent ?
Pas du tout, je n’y prête pas spécialement attention. Dès qu’un match est fini je me concentre surtout sur le suivant sans chercher à lire tout ce qui peut se dire. Ce que je vois c’est qu’on a pris les quatre points et qu’on s’est battu pour ça face à une très belle équipe.
Place désormais à Biarritz qui occupe l’autre extrémité du classement. Le FCG n’a pas toujours su bien aborder ces matchs plus « faciles » par le passé, est-ce que la leçon a été retenue ?
Biarritz quand je les vois jouer j’ai du mal à me dire qu’ils sont derniers. Déjà de par leur effectif, ils ont vraiment des joueurs très talentueux dont certains ont porté le club ces dernières années. Ensuite, j’ai vu leur match à Toulon et même leur défaite à domicile face à Toulouse où ils méritent mieux à chaque fois. Il faut que l’on se montre sérieux et appliqué parce que si ce Top 14 nous a appris quelque chose, c’est que tous les matchs sont difficiles. Je dirais même qu’on n’a pas le droit de manquer ne serait-ce que 5 minutes sinon la sanction arrive. Toutes les équipes ont des armes, des joueurs de qualité qui nous obligent à être à 100% pendant 80 minutes à chaque fois. Biarritz on les connait, on sait de quoi ils sont capables, j’espère maintenant qu’on saura s’en souvenir quand on les jouera samedi.
Le sprint final est désormais bien lancé. Quelle est ton ambition pour l’équipe ?
J’aime bien me fixer des objectifs. Je m’en suis fixé en début de saison puis j’en ai fixé de nouveaux en janvier où j’ai écrit « participer aux phases finales ». C’est un rêve de gamin, je pense que c’est le rêve de tout le monde au club et tout le monde est dans la même voie. Il nous reste des matchs difficiles, à commencer par samedi, mais on a montré jusque là qu’on était capable de faire des belles choses.
Tu parlais d’objectifs fixés en début de saison, quels étaient-ils ?
Il s’agissait plus d’objectifs personnels : je voulais jouer quelques matchs en Une.
Justement. Il y a à peine plus d’un an de cela nous t’interrogions alors que tu allais participer au Challenge Européen (Lire : A la découverte de James Hart). Quel regard portes-tu sur ces 14 derniers mois pendant lesquels tu as connu une ascension fulgurante ?
Je pense souvent à ce que j’étais il y a un an mais aussi à ce que j’étais il y a 4 mois, 3 mois etc. C’est passé vraiment très vite… C’est difficile d’avoir un peu de recul sur tout ça en étant au milieu d’une aussi belle aventure mais une chose est sûre je ne pensais pas jouer autant il y a encore quelques mois de cela.
Après il y a sans doute un peu de réussite mais surtout beaucoup de travail. Je suis quelqu’un de têtu, qui travaille très dur lors des entraînements et j’en ai été récompensé, cela m’a permis de franchir peut-être plus rapidement certains paliers.
A quel(s) niveau(x) penses-tu avoir fait les progrès qui t’ont permis de franchir un cap ?
Plutôt mentalement. J’essaye de me dire que je suis au niveau, que je peux apporter quelque chose à l’équipe.
Quand j’ai commencé à jouer au rugby c’était pour être avec des potes, toucher le ballon, prendre du plaisir. Aujourd’hui c’est cet état d’esprit là que j’essaye de conserver en me disant que le rugby n’est qu’un sport et qu’une mauvaise performance ne signifie pas la fin de tout. C’est difficile de relativiser car on est vite pris dans le tourbillon du monde pro. Rester moi-même, c’est le plus important et c’est ce qui me permet de continuer à avoir envie de progresser dans tous les autres domaines, de comprendre qu’on a toujours à apprendre dans tous les aspects du jeu.
Parlons d’un aspect particulier : le jeu au pied. Tu as passé les 100 points en Top 14 (103, avec un essai). Est-ce que tu en as retiré une satisfaction particulière ?
Pas spécialement, j’attache plus d’attention à mon % de réussite où mon objectif est de parvenir à rester au-dessus des 80%.
Peux-tu dire un mot de ta relation avec ton entraîneur Claude Mignaçabal qui, sur son compte Facebook, a l’air lui aussi très attaché à la question du % de réussite ?
Cela fait trois ans que je travaille avec lui. C’est un super entraîneur et quelqu’un que j’apprécie énormément sur le plan humain. Quand je suis arrivé au club, mon premier entraînement avec le groupe pro a été pour le jeu au pied et c’est Claude qui se chargeait de la séance. On a créé rapidement des affinités, il m’a aidé et m’aide énormément à progresser dans mon jeu au pied. Il est pour beaucoup dans ma réussite dans ce domaine.
Pour finir, période de VI Nations oblige, ton cœur balance-t-il plutôt pour l’Irlande ou plutôt pour la France ?
Je ne vais pas te mentir, il balance pour l’Irlande. J’ai grandi là-bas, c’est mon pays, il me manque parfois. En plus il y a vraiment une atmosphère très particulière au tour du rugby et de l’équipe nationale.
Tu espères un jour y évoluer ?
Pour l’instant je n’y pense pas. Mon objectif c’est de jouer avec Grenoble. Plus tard, sûrement. Je pense que c’est le rêve de tout joueur professionnel de pouvoir évoluer sous le maillot de son pays. Mais chaque chose en son temps. A moi de déjà faire de très bons matchs en club avant d’un jour pouvoir essayer d’y accéder.
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