Olivier Saragaglia : « Personne ne me demande mon avis »
L’entraîneur de la réserve du GF38 revient sans langue de bois sur le début de saison de son équipe et sur la situation générale d’un club qu’il côtoie depuis plus de 30 ans.
L’entraîneur de la réserve du GF38 revient sans langue de bois sur le début de saison de son équipe et sur la situation générale d’un club qu’il côtoie depuis plus de 30 ans.
Olivier, comment juges-tu la saison de ton équipe après avoir disputé un bon tiers des matchs de championnat ?
« On mériterait d’être dans les 5 premiers mais on manque de régularité. Je parle de régularité à l’intérieur d’un même match. On alterne le bon et le très moyen. Généralement, sur nos temps faibles on prends des buts et sur nos temps forts on manque d’efficacité. C’est exactement ce qui s’est produit lors de notre dernière rencontre face à Cournon. On prend un but d’entrée avant de faire une excellente première mi-temps. On égalise juste avant le retour aux vestiaires mais en seconde période on lâche complètement prise. Le fait de retrouver le Clos d’Or – et ses problèmes de dimensions et de qualité du terrain – a également coïncidé avec de moins bons résultats. »
Peut-être encore plus que les autres saisons, l’effectif est jeune…
« Il est plus jeune que d’habitude oui mais au niveau qualité il est très intéressant. Il leur reste à travailler le domaine mental. Il faut qu’ils parviennent à plus se lâcher. Tout le talent du monde ne suffit pas pour passer pro. Ce manque d’expérience est pour l’instant préjudiciable dans nos résultats. »
L’équipe semble également peu fournie en attaquants purs…
« Je pioche effectivement chez les U19 avec Bendahmane ou Thauvin. A la base on comptait sur Mendes mais il est arrivé à s’imposer à l’étage du dessus, ce qui reste notre but dans la formation. A Cournon, Thauvin a fait un très bon match en pointe. Il aurait mérité de marquer. Il manque encore pour le moment de lucidité, de calme devant les buts mais ça viendra. »
Le fait de régulièrement surclasser les joueurs, dans ton équipe ou chez les U19 et les U17 n’est-il de toute façon pas bénéfique dans une optique formation ?
« C’est bénéfique quand le maintien est assuré. Pour les U17 et les U19, on peut considérer que c’est déjà fait. Pour nous, rien est acquis. Il reste encore énormément de matchs et je ne sais pas dans quel état mental vont finir les joueurs compte-tenu de la situation du club. »
Un petit mot sur la Gambardella. Est-elle un objectif majeur cette saison ?
« On verra au fur et à mesure. Il faut déjà avoir un peu de chance au tirage, pour le moment c’est le cas. Il ne faut pas avoir trop de blessés non plus et puis l’équipe sera tributaire des besoins en CFA tant que le maintien ne sera pas assuré. Maintenant c’est vrai que cela reste une belle vitrine pour le club. »
Comment vivez-vous la situation très compliquée du club à la formation ?
« On a la sensation d’être complètement isolé, « un village gaulois ». On a pas le sentiment de faire partie d’un club. Et cela fait 6/7 ans que cela dure. Les dirigeants se sont succédés, ils viennent à chaque fois se présenter, avec de beaux discours mais derrière il n’y a plus personne et on ne les revoit plus jamais. Japonais ou pas d’ailleurs, donc on ne peut même pas avancer la barrière de la langue comme excuse. Le seul contact que l’on a, c’est avec l’association. Ils viennent voir nos besoins toutes les semaines. Si l’équipe 1 peut aujourd’hui aligner 11 joueurs, c’est grâce à la formation et on a tendance à vite l’oublier dans ce club. »
Ce manque de communication a-t-il existé, existe-t-il, avec Mécha Bazdarevic et Yvon Pouliquen ?
« L’entraîneur que je suis apprécierait bien évidemment plus d’échanges. Mais compte-tenu de la situation de l’équipe, ils avaient d’autres chats à fouetter, d’autres priorités que je peux tout à fait comprendre. Malgré l’année difficile, Yvon Pouliquen continue de venir à chaque match que nous disputons. Le problème ne se pose donc pas avec le staff de la Une. »
Que souhaiterais-tu de la part des dirigeants ?
« Cette semaine je suis allé sur les sites internet de la plupart des clubs de Ligue 2. Ils ont tous des photos de leurs infrastructures et de partout c’est mieux qu’ici. Aujourd’hui, nous n’avons pas des infrastructures dignes d’un club pro. Le centre de formation et le centre d’entraînement devraient être les fondations de tout club professionnel. Ce n’est pas de moi, c’est Dominique Cuperly qui le disait déjà à l’époque. On devrait s’inspirer que ce fait Le Mans, notamment. Ils n’ont construit leur stade qu’en dernier. Ils ont d’excellentes infrastructures sur lesquelles s’appuyer. Et quand ils descendent en Ligue 2, ils ne boitent pas, cela reste solide. C’est aussi le cas de Châteauroux, de Troyes, d’Amiens… Ici, le stade n’est que l’arbre qui cache la forêt. »
Quel est l’état du centre aujourd’hui ?
« On vit de rafistolage et c’est pareil depuis 15ans. Heureusement, la Métro fait de gros efforts pour améliorer notre quotidien. Mais aujourd’hui, nous sommes locataires, pas propriétaires. Le club ne possède rien. Si un repreneur se présente, il faudra qu’il ait une volonté de construire et d’être propriétaire. Même si sur le court terme les problèmes sont ailleurs, si on ne commence pas par les bases dans plusieurs années le club connaitra les mêmes soucis qu’aujourd’hui. Ce n’est pas bon de travailler sur l’urgence si on ne va pas dans le fond du problème. J’aimerais pouvoir tenir ce discours aux dirigeants (je dis « je » mais j’associe Bernard Blaquart et tout le monde au centre) mais personne ne me demande mon avis. »
Ton statut d’ancien du club te confère pourtant a priori une certaine légitimité…
« J’ai pris ma première licence au à Grenoble à mes 7 ans. J’ai été joueur 15 ans, entraîneur 10 ans. Je pense donc avoir un peu l’expérience du club oui ! J’ai mes idées et je pense qu’il serait légitime d’être au moins consulté. Après bien sûr je ne prétends pas détenir la vérité. Il y a des gens compétents dans ce club, des gens qui ont envie de s’investir… Le pire c’est que j’ai l’impression de revivre des situations qu’on a déjà connu dans ce club par le passé. J’ai connu déjà plusieurs dépôt de bilan ici et on ne tire pas les leçons du passé. A chaque fois, ce sont les Grenoblois qui ont fait repartir le club, sur le terrain et en dehors. Pour caricaturer, les Grenoblois relancent le club, le font monter en Nationale, en L2 et puis on leur demande plus ou moins gentiment de partir. »
Est-ce que tu t’attendais quelque part à voir le club là où il en est aujourd’hui ?
« Je m’y attendais depuis un moment. On ne pouvait pas tenir comme ça. La montée s’est sûrement faite trop rapidement. J’étais content bien sûr mais je pensais déjà à l’époque que nous allions faire comme Istres. Finalement on s’est maintenu la première année mais on n’a pas su en profiter pour construire quelque chose de solide. Évidemment quand tout va mal c’est difficile de mettre l’accent sur les infrastructures mais là tout allait plutôt bien et le club n’a pas fait les efforts. C’est d’autant plus décevant que Grenoble doit avoir un club de Ligue 1 qui joue le milieu de tableau, qui ne boite pas quand il descend en Ligue 2 de temps en temps. Le potentiel est là mais vu le fonctionnement du club notre place n’est pour le moment pas en L1 et même pas en L2 »
Crédit photo : Alain Thiriet