#Portrait Jean-Louis Livrieri : utopiste et révolté
Suite à une lourde suspension écopée en fin de saison, Jean-Louis Livrieri a sérieusement songé à tirer un trait final sur sa carrière. Mais à bientôt 32 ans le milieu de terrain, qui évoluait à l’ASIEG ces dernières saisons, a toujours envie et s’est décidé à ne pas raccrocher les crampons.
Des choix forts, Jean-Louis en a fait quelques-uns tout au long de son parcours de footballeur. Après avoir commencé à Grenoble, il rejoint Échirolles en 16 ans nationaux. C’est avec le FCE qu’il découvre le monde seniors, avec même quelques petits bouts de matchs en CFA2, avant de prendre la direction de l’US Gières. Il y reste quatre saisons, placées sous le sceau de la réussite, avec notamment une accession en DHR.
Il prend pourtant un gros tournant dans son parcours en 2015 pour rejoindre l’ASIEG, alors en Promotion d’Excellence. « L’équipe était reprise par mon père (Tony Livrieri) et avec ma femme nous attendions des jumeaux. Donc même si je rejoignais un club plus modeste je pouvais faire d’une pierre deux coups en étant plus présent pour ma famille tout en vivant une première expérience sous les ordres de mon père. Sans compter que je connaissais déjà très bien la famille Scarpa, j’avais fait mon sport étude en compagnie de Dominique, donc je me retrouvais vraiment dans une ambiance très familiale. »
Ce compétiteur né découvre alors un contexte différent, plus « détente ». « On peut même presque parler de football différent. Pour moi qui suis à 2000% même lors des entraînements il a fallu m’habituer à cet aspect là. Après avec les arrivées, mon père et Sousou (Brazane, qui a repris l’équipe Une cette saison après le départ de Tony Livrieri, ndlr), cela a un peu évolué mais les vieilles habitudes restent. Ce qui n’a d’ailleurs empêché en rien les réussites sportives ».
En championnat le club grenoblois accède ainsi au plus au niveau départemental et s’y maintient cette saison, « même si à mes yeux on a manqué de régularité et qu’on avait le potentiel pour jouer la première partie du classement » précise le milieu de terrain. L’ASIEG réalise également un beau parcours en coupe de l’Isère en 2016 avec une victoire mémorable face à Manival, « qui comptait dans ses rangs à l’époque des joueurs comme Mathieu Gourgand et Anthony Vivacqua, cela reste un de mes meilleurs souvenirs surtout que personnellement j’ai manqué la plus grande partie de la saison où l’on parvient à monter en D1 à cause d’une blessure. »
Même s’il est proche de Sousou Brazane, « un super coach, qui a su apporter de la fraîcheur, de la nouveauté et son envie de pratiquer du beau jeu », sa relation avec son père fut forcément au cœur de son expérience à l’ASIEG.
« Je te confirme que cela n’a pas été facile tous les jours », sourit Jean-Louis. « Il a une mentalité à l’ancienne, un gros caractère et moi pas la langue dans ma poche. Mais c’était vraiment incroyable pour moi de pouvoir être entraîné par lui pour la toute première fois. »
Pourtant Livrieri père et fils ont une vision diamétralement opposé du football. « J’aime quand ça joue bien alors que lui est un peu plus pragmatique : il faut d’abord bien défendre et après on voit si on peut marquer. Comme on a deux philosophies vraiment opposées, on a parfois eu quelques discussions houleuses, mais toujours dans le respect. J’ai bien sûr toujours respecté ce qu’il voulait, c’était lui l’entraîneur. Mais j’ai ce côté un peu plus utopiste : si on ne joue pas bien ce n’est pas vraiment gagner, même si le résultat est là. C’est peut être faux mais c’est ma vision. »
Une vision qu’il imposera d’ailleurs peut être lui même un jour en tant que coach. L’envie est en tout cas là. « J’avais un peu entraîné en jeunes à Échirolles mais j’ai mis ça de côté pour m’axer uniquement comme joueur. Mais j’y réfléchis depuis 2-3 ans, quand j’ai commencé à approcher la trentaine. »
Mais pour voir Livrieri junior sur un banc il faudra encore patienter un peu. Et pourtant il a très sérieusement songé à raccrocher les crampons, « révolté » par une suspension de 11 matchs (encore à purger).
« Dire qu’en Ligue je n’ai pratiquement jamais été suspendu à part suite à trois jaunes… Mais depuis que je suis en Distriect j’ai pris une fois 6 matchs, 1 fois trois matchs pour des tacles trop appuyés. Et là c’est 11 matchs…
J’ai mes torts. Et je n’ai aucun problème à les assumer. Mon rouge il était totalement justifié, j’ai fait une connerie (il a montré trop de véhémence et de proximité avec l’arbitre après un penalty sifflé contre son équipe, ndlr). Mais prendre 11 matchs… Je me sens comme le dindon de la farce, je suis révolté. Révolté parce que 75% du rapport de l’arbitre est faux, il écrit que je l’insulte, que je le menace. J’avais même un joueur de la Vallée (adversaire ce jour là) prêt à témoigner en ma faveur. Je suis partisan de mettre les arbitres dans les meilleures conditions mais ce que je regrette, au-delà du comportement un peu « cow-boy » de certains, avec qui il est impossible de discuter, c’est que justement aujourd’hui notre voix (aux joueurs, entraîneurs, ndlr) elle ne compte pas. C’est le système que je regrette le plus : tu ne peux même pas te défendre, si le mec en face te désigne comme coupable, c’est terminé. Et c’est dommage, plus de dialogue pourrait améliorer les choses. »
Une pilule difficile à accepter pour un joueur qui a toujours respecté les limites tout au long de sa carrière. « Honnêtement jusqu’à il y a 15 jours je pensais tout arrêter devant cette suspension de 11 matchs ». Mais Jean-Louis a pu compter sur le soutien de ses proches. « Sousou, Alexis (Sandre, un coéquipier ndlr) et même m’a femme m’ont dit que pas me laisser abattre, que je n’étais pas un voyou et que je ne pouvais pas rester sur ça. Ca m’a fait réfléchir, je me suis remotivé, je suis allé courir, je m’entretiens ça fait du bien. Et aujourd’hui je suis partant pour un nouveau défi. »
Un nouveau challenge qui pourrait d’ailleurs se faire sous un autre maillot que celui de l’ASIEG. A Grenoble ou ailleurs Jean-Louis Livrieri continuera d’apporter sa vision du football. Celle d’un amoureux du beau jeu et d’un compétiteur. Les 11 matchs à purger seront sans doute très long à vivre pour le joueur. Mais il faut plus que quelques semaines de suspension pour dégoûter un rêveur…